
En début d’année, ma copine (celle qui me torture chaque semaine en cours de contorsion avec beaucoup d’amour et une pointe de sadisme) m’a fait atteindre un objectif que je pensais réservé à mes rêves : j’ai réussi à descendre en grand écart complet. Même mes psoas en sont restés bouche-bée. Je ne m’y attendais tellement pas que ma mâchoire a failli se décrocher. Ma copine non plus n’en revenait pas. Elle a fait une petite danse de la joie et a couru prendre son téléphone pour immortaliser ce moment.
Si je vous raconte ça, ce n’est pas pour me vanter (enfin si, un peu, parce que je ne pensais pas y arriver aussi « vite ») mais parce qu’il y a un parallèle qui m’a frappé quand j’y repensais dans la journée.
Le corps qui dit non (et qu’on n’écoute pas toujours)
Quand j’ai commencé à travailler la contorsion, j’ai très vite été freinée dans mes envies d’écarts par une fort douleur à la cuisse gauche. Cette douleur je la connais bien car elle m’accompagne depuis des années, elle m’a embêté en danse classique puis en boxe. Je devais vraiment prendre le temps de m’échauffer correctement pour ne pas me blesser. Impossible de me rappeler d’un incident qui aurait pu expliquer cette énorme douleur mais autant dire que si elle m’avait gêné pour les 2 précédents sports, elle est devenue un énorme obstacle dans ma nouvelle passion pour la contorsion.
Vous me direz « Mais le principe de la contorsion c’est d’avoir mal, non ? ». Oui et non. En contorsion on apprend les différents types de douleurs, celles dans lesquelles on peut respirer et aller un peu plus loin et celles qui sont une alerte du corps qu’il faut vraiment écouter. Cette douleur était évidemment dans la 2ème catégorie.
Ma copine a bien tenté divers exercices, mais rien n’y faisait. Pire : une fois, après un exercice pourtant indolore sur le moment, j’ai fini avec une raideur dans la cuisse bien plus handicapante, qui nous a bloqué durant plusieurs semaines. C’était un sacré casse-tête !
Cependant, en tâtonnant nous avons trouvé des exercices qui étaient efficaces et non douloureux. Plutôt que de se focaliser sur l’étirement de la cuisse, ma super-coach a voulu se concentrer sur ce qui l’entourait, voir si en agissant ici ou là, cela permettait de débloquer telle ou telle partie (je ne vais pas rentrer dans les détails anatomiques, même en étant infirmière, elle me parle de choses tellement pointues que je hoche juste la tête en disant « Ah oui….Je vois je vois » alors que pas du tout (de mon côté je lui apprends plein de trucs sur la sexualité, chacun son domaine d’expertise !)). Mois après mois, on a commencé à détendre les tensions, à ouvrir des portes fermées depuis longtemps. Ce travail nous a pris presque 1 an, un an de tâtonnements, de régressions, de « Et si on passait par là pour voir ce que ça donne ? » et de « Stooooooop j’ai mal ! », de frustrations mais aussi une année où elle m’a appris à me faire confiance, à faire confiance à mon corps, à lui faire confiance aussi à elle lorsqu’elle venait poser son poids sur moi, à me concentrer sur mes sensations, à les étudier, à devenir copine avec les différents types de douleurs, à devenir copine avec l’inconfort…
Petit à petit j’ai remarqué que, si je prenais le temps de m’étirer un peu chaque jour, cette douleur ne venait plus m’embêter. Cependant, si par malheur je loupais quelques jours d’exercice, alors elle revenait dans ma vie, tel un ex relou à 4h du mat un samedi.
Et puis, sans vraiment comprendre pourquoi ou comment, à la rentrée de septembre, je me suis rendue compte qu’elle était partie. J’avais beau avoir loupé mes entrainements, ma cuisse ne me faisait plus mal. Cet ex relou aurait-il trouvé l’amour pendant l’été ? Ciel ! Voilà donc une bonne nouvelle !
Et le rapport avec la sexualité dans tout ça ?
Et bien j’ai trouvé qu’il y avait un parallèle intéressant avec les blocages dans la sexualité. Par le passé, j’ai rencontré des personnes qui m’ont poussé à forcer mes étirements, malgré le fait que je dise que ça me faisait mal et que ce n’était pas une douleur agréable. « Aucune douleur n’est agréable C’est normal dans les étirements d’avoir mal. Il faut que tu te forces un peu ». Sauf que de nombreuses fois, ce « forçage » n’a fait qu’aggraver ma douleur et pire : j’ai renforcé petit à petit ma peur de me faire encore plus mal. Vous voyez où je veux en venir ?
Quand on a un blocage en sexualité, foncer et forcer a de grandes chances de ne pas marcher et pire, cela peut empirer la situation. Le corps et l’esprit gardent en eux les mauvaises expériences, les douleurs, les traumas et quand ils envoient l’addition, cela peut faire très mal ! Débloquer une situation peut prendre du temps et le processus doit être « sur mesure » : tout le monde est différent, avec des corps différents, des histoires de vie différentes, etc. Tout comme mon amie a tâtonné pendant 1 an, me faisant tester des choses qui ne marchaient pas et d’autres qui marchaient, il est possible qu’il faille du temps pour débloquer certaines parties de sa sexualité
Le second point important dans ce parallèle est le rapport au corps. Mes déblocages n’auraient pu se faire si j’avais fonctionné contre mon corps et non avec lui. Il a fallu que je prenne le temps de me connecter à lui, de vivre et ressentir pleinement toutes les sensations, de travailler ma respiration afin qu’elle devienne une puissante alliée. J’ai tout étudié, de mes orteils à mon crâne, toutes les douleurs, les sensations de chaud, de froid, de courant électrique… Je me suis rendue compte que certains exercices venaient carrément étirer…mes parties intimes ! Mon amie a appelé cela le « vagin stretch » et depuis c’est devenu une sorte de maitre-étalon dans nos séances. Bref c’est vous dire si je suis allée loin dans l’écoute de mon corps.
Et aujourd’hui ?
L’amourette de vacances de mon ex n’a pas tenu mais cela semble lui avoir bien changé les idées. Je pense surtout qu’il est allé en thérapie apprendre à gérer ses émotions car il réapparait mais moins et sous une forme différente : il est apaisé. Ses messages ne sont plus agressifs, il me donne de ses nouvelles, cela me fait toujours un petit quelque chose bien sûr mais je passe rapidement à autre chose. Autrement dit, ma douleur s’est transformée en légère gêne, qui revient de temps en temps mais ne m’empêche plus d’avancer. Je la vois, je l’entends et je fais avec elle, doucement.
Pour conclure cette longue tirade :
- Aller mieux, ça prend du temps.
- Ça demande d’écouter, pas de forcer.
- Il faut parfois passer par des chemins détournés pour libérer ce qui bloque.
- Trouver une personne bienveillante et compétente peut être l’élément qui change tout
- Et surtout : faites des étirement pu****, ça change la vie vous n’imaginez même pas !
Je vous embrasse